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Le régime sans blé

Origine du régime 

 

Au départ, le régime sans blé était conçu pour les individus souffrant de la maladie coeliaque, une sorte d’allergie alimentaire au gluten qui entraîne de nombreux problèmes de santé. Or, le cardiologue américain William Davis a popularisé ce régime auprès des individus sans intolérance au gluten grâce à la publication de son livre « Wheat Belly ». En effet, son livre, publié en 2011, fut un réel succès: il est devenu un best-seller aux États-Unis et à réellement contribué à transformer la vision populaire sur la consommation de blé. La vague de popularité du « sans gluten » a débuté inévitablement aux États-Unis mais commence désormais à se déferler partout dans le monde. De plus en plus d’individus croient aux fondements scientifiques de sa théorie, et ainsi, les produits contenant l’étiquette « sans blé » se multiplient à une vitesse phénoménale.

 

** (à mettre en quelque part, je ne sais pas ou encore) 

Au fait, qu’est-ce que le blé ? et qu’est-ce que le gluten?

Le gluten n’est pas une toxine ou un déchet comme Dr Davis semble l’affirmer, il s’agit en fait d’une protéine qui existe naturellement dans certaines céréales comme le blé, l’orge et le seigle. Cette protéine est en fait composée de deux chaînes d’acides aminés :  la gliadine et la gluténine. Le mot « gluten » est un mot latin pour « colle ». Cette appellation concorde avec son rôle essentiel; le gluten permet de tenir la pâte du pain ensemble; elle lui donne ainsi sa texture moelleuse. C’est pourquoi le pain sans gluten à tendance à être plus sec, à s’égrainer facilement et à être plus dur.

 

Théorie 

 

Selon ce cardiologue, le blé serait à l’origine de l’augmentation de l’obésité aux États-Unis en plus d’être la source de nombreuses maladies telles que le diabète, la cardiopathie, certains cancers, plusieurs maladies de peau, l’ostéoporose, l’arthrose, la fatigue, les difficultés de concentration ainsi que certaines maladies mentales telles la schizophrénie et l’autisme. Selon Davis, la suppression du blé de l’alimentation entraîne des résultats bénéfiques spectaculaires contre ces maladies. 

 

Le régime du Dr Davis se résume donc de manière très simple : tout aliment contenant du gluten doit être immédiatement coupé de l’alimentation.

 

Fondements scientifiques de la théorie et critiques

 

1- Indice glycémique

 

L’hypothèse de Davis repose en grande partie sur l’affirmation que le blé est caractérisé par un indice glycémique (IG) très élevé. Selon les propos tenus dans son livre, l’IG de tout aliment contenant du blé serait plus élevé que ceux contenant du sucre de table (sucrose). En effet, il affirme que « le blé fait grimper le taux de glycémie pratiquement plus que tout autre aliment glycémique, haricots et confiseries en barre compris. » Cette simple observation lui suffit alors pour classer tout aliment contenant du gluten comme étant nocif pour la santé.

 

Pour appuyer ses dires, Dr Davis montre que la consommation de tranches de pain composés de blé entier est plus nocif pour la santé que l’ingestion d’une boisson gazeuse ou d’une barre sucrée en comparant leurs indices glycémiques. En effet, il compare l’indice glycémique de la barre Mars qui est de 68 avec celui du pain de grains entier qui est de 72 et conclue ainsi que le pain entier est plus nuisible pour la santé.

 

Or, ces conclusions sont scientifiquement non valables. En effet, il est tombé dans le piège typique de tout amateur qui tente d’analyser les indices glycémiques des aliments. Première erreur: il s’est fié à un seul type d’aliment très sucré (la barre Mars) et à un seul type de pain. En observant le tableau d’indice glycémique, il est possible de remarquer que l’IG du pain entier varie entre 39 et 78 et qu’il existe des aliments à sucre raffiné avec des indices glycémiques beaucoup plus élevé que celui de la barre Mars. Il est donc clair que Dr Davis a choisi des données qui avantageaient ses propos.

 

Deuxième erreur : incompréhension complète du concept d’indice glycémique. Les indices glycémiques déterminent la capacité d’un aliment à augmenter la glycémie du corps, mais ne sont en aucun cas suffisant pour déterminer si un aliment est nocif pour la santé ou non. En effet, ces indices peuvent guider nos choix de glucides et nous permettre de préférablement choisir de consommer des lentilles à des pâtes alimentaires. Or, lors de leur analyse, il faut garder en tête que tout aliment qui contient des sucres raffinés ou cachés (sucreries, biscuits, barres chocolatées, etc.) sont automatiquement nocifs pour la santé et doivent être proscrit de notre alimentation peu importe l’indice glycémique qu’ils possèdent. En effet, une limite des indices glycémiques est le fait qu’ils ne prennent pas en considération la valeur nutritionnelle des aliments: ils ne tiennent pas compte de leur apport en protéines, en fibres ou en lipides, éléments essentiels à l’analyse de l’effet d’un aliment sur notre santé. Lors de leur analyse, il faut donc faire preuve de jugement, ce que Dr Davis n’a évidemment pas su faire. 

En savoir plus sur l’indice glycémique

 

2- Transformations génétiques du blé

 

Un autre argument central de la théorie de Davis repose sur le fait que le blé est nocif pour la santé dû aux nombreuses transformations génétiques que cet aliment a subi depuis les 50 dernières années. Selon lui, le blé moderne n’est plus lui qui existait dans le temps de nos grands-parents, car l’homme intervient constamment dans sa fabrication. 

Or, il n’y a pas de preuve scientifique qui supporte cette hypothèse. Tout d’abord, des spécialistes du blé ont comparé les différentes cultures de blé depuis les 50 dernières années pour montrer qu’il est vrai que le blé s’est transformé, mais que celui-ci contient exactement les mêmes nutriments qu’il contentait auparavant.

 

D’autre part, pour prouver son point, Davis mentionne l’étude scientifique de van den Broeck qui a examiné l’effet de la sélection artificielle du blé sur la présence de molécules intervenant dans la maladie coeliaque, soit une maladie auto-immune qui s’attaque au petit intestin. Cette étude montre que les variétés modernes de blé ont effectivement davantage de molécules pouvant agir négativement sur les individus affectés par cette maladie. La généralisation de cette étude à l’ensemble de la population est donc complètement fausse; elle ne concerne que la minorité de la population (1%) aux prises avec cette intolérance alimentaire. D’ailleurs, l’étude termine en proclamant qu’il faudrait trouver une manière de transformer génétiquement le blé pour qu’il ne soit pas néfaste pour les individus souffrant de la maladie coeliaque. L’étude est donc en faveur des transformations génétiques du blé, élément que Davis omet évidemment de citer dans son livre.

 

Autre fait intéressant, Davis s’acharne aux transformations génétiques du blé, mais oublie de montrer que plusieurs autres aliments, ont également subi des transformations génétiques à travers les années. D’ailleurs, certains de ces aliments sont même recommandés d’être consommé sans aucune restriction dans son propre régime. Les crucifères, tels le brocoli ou le chou-fleur, sont de bons exemples de ces aliments.

 

Finalement, Davis repose son hypothèse selon laquelle le blé moderne est plus nocif que l’ancien blé sur une expérience personnelle qu’il a mené. En effet, il a lui-même ingéré pendant une certaine période de temps du pain contenant le blé d’aujourd’hui et après un certain repos, a recommencé l’expérience avec du pain qui, cette fois, contenait de la farine de petit épeautre, grain de blé supposément génétiquement plus proche de celui consommé par nos ancêtres. Puisque Davis s’est senti mieux lors de la deuxième partie de l’expérience, il en a donc conclu que le blé d’aujourd’hui a mal tourné à cause des transformations génétiques qu’il a subi. Il est évident qu’une telle expérience n’est aucunement crédible et ne devrait pas apparaître dans un ouvrage se voulant scientifique. 

 

3- Le blé agit comme une drogue

 

Davis explique les effets nocifs du blé en expliquant qu’il agit comme une drogue puissante, comparable à l’héroïne. Il indique que le blé, telle une drogue, cause de la dépendance, du délire, des hallucinations et serait responsable de la schizophrénie.

Pour montrer son point, Davis utilise des études qui ont testé les effets de la naloxone, médicament qui peut contrer les effets des drogues fortes comme l’héroïne. Par exemple, l’étude de Cohen et coll. est utilisée, car elle examine les effets de ce médicament sur la consommation d’aliments des individus. Davis utilise l’étude pour montrer que l’apport calorique des patients qui consommaient à priori du blé et dont ce médicament a été administré a diminué ce qui n’a pas  été le cas pour ceux qui n’avaient pas pris le médicament. Ceci prouverait donc que le blé agit comme l’héroïne pour créer une dépendance chez son consommateur. Or, en analysant réellement l’étude utilisée pour parvenir à cette conclusion, il est possible de remarquer qu’elle ne s’intéressait pas réellement au blé et à ses produits dérivés. Les quantités d'aliments consommés par les participants étaient mesurées, mais la variété d’aliments n’étaient pas décrite dans l’étude. Ainsi, il est faux d’assumer que les participants étaient des consommateurs de blé. 

 

D’autre part, l’étude montre que le naloxone a eu des effets significatifs sur la diminution de la consommation de lipides et de protéines, mais non sur les glucides: « L’analyse des calories ingérés démontre des effets significatifs de la naloxone sur la réduction des protéines et gras ingérés. La naloxone n’a pas eu d’effet significatif sur l’ingestion de glucides. »

 

Une autre étude, cette fois menée par Drewnowski et coll. en 1995 montre que les effets les plus marqués du médicament étaient remarqués sur les aliments sucrés (bonbons, chocolat, etc) et non sur des produits contenant du blé. 

 

Ainsi, aucune étude ne montre qu’il existe un lien entre la naloxone et la consommation de blé comme le prétend Dr Davis. 

 

4- Le blé est la cause de plusieurs maladies

 

1- Le diabète

 

Le cardiologue explique que le blé est la principale cause du diabète. Or, lors de l’élaboration de sa théorie dans le chapitre dédié à cette maladie, il n’oriente pas la discussion autour du blé, mais plutôt autour des glucides en général. Puisqu’il considère que le blé est le chef des glucides, il ramène alors toutes ses conclusions concernant les glucides à celui-ci.

Toutes les études citées dans son livre vont dans le même sens: elles prouvent les effets bénéfiques d’un régime pauvre en glucides sur des patients atteint de diabète, mais ne montrent jamais un lien direct entre le blé et le diabète. En fait, elles ne nomment jamais le blé ni les grains en général comme étant la cause directe du diabète. 

 

 

2- Les problèmes de peau

 

Le blé, selon Davis, serait responsable d’une douzaine de maladies de la peau. Malgré le fait que de nombreuses études montrent un lien entre un régime riche en glucides et des problèmes de peau, aucune d’entre elles ne créent un lien direct entre ces problèmes et le blé. 

 

Dans le chapitre dédié à ce thème, Davis fait preuve de sophisme, puisqu’il généralise les effets du gluten à partir de cas très particuliers. Par exemple, Davis prend l’exemple de la dermatite herpétiforme, une maladie inflammatoire cutanée chronique qui est associée au gluten présent dans le blé pour appuyer sa démonstration. Or, la dermatite herpétiforme est une maladie rare qui n’atteint que 0.01% de la population. Il est exact que pour cette minorité de la population, les conclusions de Davis s’avèrent vraies, mais elles ne le sont certainement pas pour le reste, qui correspond à la grande majorité de la population. 

 

3- L’ostéoporose

Davis réfère à l’étude de Jenkins et coll. de 2003 pour montrer que le blé cause des maladies osseuses. Il indique que l’étude tente de mesurer les effets de la consommation de gluten sur la teneur de calcium dans l’urine. Puisque la quantité de calcium augmente dans l’urine suite à une consommation accrue de gluten, il conclut que ce dernier nutriment peut causer de l’ostéoporose. Or, suite à une bonne analyse de l’étude, il est plus exact d’affirmer que l’augmentation du calcium dans l’urine est reliée à l’augmentation de l’apport en calcium ingéré et n’indique pas de dégradation du calcium osseux. Les auteurs montrent que le gluten n’a pas d’effet néfaste sur le bilan de calcium, malgré l’augmentation de la présence de calcium dans l’urine. Le gluten n’est donc pas la cause de cette maladie osseuse comme Dr Davis le prétend. 

 

Tous ces éléments montrent que les fondements scientifiques du régime sans blé sont remplis d’absurdités. Ainsi, le régime sans blé est uniquement basé sur de fausses croyances. 

 

Plusieurs partisans de ce régime pourraient me contre-argumenter en me citant les bienfaits qu’ils ont ressentis suite à l’adoption de ce régime. Voici donc une liste des bienfaits couramment nommés par ceux qui pratiquent le régime sans blé et l’explication scientifique derrière les bienfaits ressentis. Vous remarquerez alors que tout sauf le fait de bannir le blé de votre alimentation est à l’origine des arguments en faveur du régime sans blé.

 

1- Manger sans gluten est meilleur pour la santé

Plusieurs individus pensent que le gluten est mauvais pour la santé. Ils prétendent souvent que le régime sans gluten leur permet de se sentir plus en santé; ils se sentent mieux dans leur corps et leur esprit. Or, ce n’est définitivement pas le gluten qui est la cause de cette soudaine vitalité de corps et d’esprit. En effet, il est prouvé que les aliments composés de grains entiers sont excellents pour la santé, car ils sont une bonne source de protéines, fibres, vitamines et minéraux. Tous les végétariens utilisent d’ailleurs le gluten comme source principale de protéine; toute imitation de viande (seitan) contient ce nutriment essentiel. D’ailleurs, les aliments sans gluten sont souvent plus néfastes pour la santé que les aliments qui en contiennent. En effet, pour que les aliments sans gluten gardent la même consistence et le même goût que ceux qui en contiennent, les industries alimentaires doivent souvent ajouter du sucre, du gras et du sel, éléments que nous savons nocifs pour la santé. De plus, ces aliments présentent souvent une quantité moindre de fibres, de vitamines B, de fer et de calcium. Qu’est-ce qui est à la base du sentiment de vitalité alors me demanderiez-vous ? Il est tout simplement provoqué par la perte de poids qui s’enclenche lorsqu’un tel régime est entrepris. En effet, le régime sans blé agit comme n’importe quel régime hypocalorique; le fait de couper le blé réduit une part importante de calories ce qui donne souvent aux individus le sentiment d’être désormais plus en santé.

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2- Manger sans gluten fait perdre du poids

Évidemment, puisque manger sans gluten revient à entreprendre un régime hypocalorique. Ce n’est pas l’absence de gluten qui fait maigrir, mais la diminution d’apport en hydrates de carbones.

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3- Le gluten cause des troubles digestifs

Plusieurs personnes ressentent un soulagement gastrique lorsqu’ils décident de couper le blé. Ils pensent alors que le gluten est à l’origine de troubles digestifs et que le fait de le couper permet de régler ces problèmes. Or, encore une fois, cette croyance populaire est fausse. Le gluten cause uniquement des troubles digestifs chez les personnes qui sont atteint de la maladie coeliaque. Cette maladie est en fait une sorte d’allergie au gluten. Le système immunitaire d’une personne atteinte de cette maladie agit de manière négative à l’absorption du gluten et endommage la paroi intérieur de l’intestin grêle. Certains symptômes de cette maladie concerne effectivement des troubles gastro-intestinaux, des flatulences et de la diarrhée. Or, cette maladie affecte uniquement 1% de la population. Pour le reste de la population, il n’y a encore aucune étude scientifique certaine qui montre qu’une intolérance au gluten sans maladie coeliaque peut exister. La plupart des études montrent que les troubles digestifs seraient plutôt reliés aux FODMAPs (fermentable, oglisaccharides, disaccharides, monosaccharides and polyols). Ce terme compliqué fait référence à peu près à tous les aliments contenant des glucides. Ainsi, les troubles digestifs seraient reliés à la consommation d’hydrates de carbone en général et non seulement aux aliments contenant du gluten. 

En savoir plus sur les hydrates de carbone

 

Avantages du régime

  • Facile à suivre : Il est certain que le régime sans blé est simple à entreprendre, puisque tout le monde sait quels aliments contiennent du blé, et donc, quels aliments sont à proscrire.
  • Perte de poids : Comme tout régime restrictif, ce régime va entraîner une perte de poids.

 

Inconvénients :

  • Fondements scientifiques non valables
  • Régime restrictif pouvant causer un effet yo-yo
  • Manque d’un éléments nutritif essentiel
  • Des études montrent que le gluten contribue à réduire des maladies chroniques, comme le diabète et des maladies cardiovasculaires et contribue à réduire l’obésité

 

Sources :

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